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Cours particuliers, progrès ou individualisme ?

Dernière mise à jour : 7 oct. 2024

Encore inexistants il y a quelques années, les cours particuliers de hockey se multiplient dans les clubs et ne sont pas vus d’un très bon œil par certains parents ou coéquipiers. Que faut-il en penser ? On fait le point.  


Lundi, 17h30, dans un club de la périphérie bruxelloise. Les entraînements des jeunes ont déjà commencé, les terrains sont tous occupés, autant que les entraîneurs qui tentent de mettre de l’ordre dans ce joyeux chaos. Tous les terrains sont occupés, sauf cette petite parcelle sur laquelle ne s’entraine qu’un seul jeune, supervisé par une tête bien connue du hockey belge. Il a pris une session de cours de perfectionnement estampillée Red Lions et reçoit des indications pointues de la part d’un des cadors de l’équipe nationale. Mais est-ce bien accepté et bien vu par les autres joueurs ou parents de joueurs ? Nous posons la question à ce papa, qui, sans être totalement négatif, fait néanmoins la moue : « le hockey est quand même un sport d’équipe, c’est bizarre de voir un joueur s’entraîner seul et recevoir des conseils en privé. Ça fait très individualiste, je trouve. »


« Avant, les jeunes trainaient aux clubs, passaient du temps sur le terrain et tapaient la balle parce qu’ils arrivaient trop tôt ou que leurs parents venaient les chercher plus tard. Ils jouaient, tout simplement, sans les conseils de personne. Certains jouaient aussi avant le match de leur papa, puis restaient un peu trainer sur le terrain. Aujourd’hui, à cause de l’expansion des clubs, beaucoup des plages horaires sont occupées et on voit de moins en moins de jeunes accompagner leurs parents au match, nous explique Jeremy Caenen, fondateur de l’académie Ballostick, une des premières du genre au Waterloo Ducks.


La qualité individuelle est au service du collectif

Mais ce n’est pas l’offre qui est venue en premier, c’est la demande. Il y a plusieurs années, des parents ont demandé à des joueurs de l’équipe DH s’ils seraient d’accord de donner un ou des cours de perfectionnement à leurs enfants. Ces sessions individuelles se sont mises en place, mais de manière désordonnée, à des moments qui convenaient aux uns et aux autres, mais pas forcément en accord avec le club. Il fallait mettre de l’ordre dans tout cela, créer un planning et centraliser les demandes afin de ne pas empiéter sur les entraînements globaux. C’est là que Ballostick est entré en jeu. L’académie de Jeremy a permis de structurer les plages d’occupation des terrains et offrir à tous un espace de progression individuel dédié.


Bien sûr, c’est un sujet qui fait encore réagir, et c’est normal. Ce n’est pas dans l’esprit d’un sport d’équipe de s’entraîner seul de son côté, et pourtant… Tous les coachs de division honneur le diront : il faut bosser ! Même les Red Lions travaillent individuellement. Renforcement musculaire, travail sur la condition physique, mental, nutrition, ce sont tous des sujets qui ne se travaillent pas en équipe, alors pourquoi faire une différence au niveau de la technique ? Un joueur qui joue de mieux en mieux apportera de plus en plus à son équipe.


L’entraîneur/coach a pour tâche de faire travailler les jeunes en équipe, de développer certaines compétences techniques, de répéter des automatismes et de créer de la cohésion. Mais il n’a pas le temps matériel de faire travailler individuellement 16 joueurs sur leurs manquements individuels (shots, flicks, slape, jeu en 3D,…). C’est là qu’avant les jeunes qui trainaient au club essayaient de répliquer ce qu’ils voyaient en DH, aujourd’hui ce sont ces joueurs de DH qui leur enseignent dans des cours. La croissance du hockey génère aussi beaucoup de jeunes dont les parents sont non joueurs. Ils n’ont pas le réflexe de les pousser à prendre leur stick et jouer dans le jardin, de taper la balle avec eux ou ou encore de savoir les conseiller sur des mouvements à répéter.


10.000 de travail et de répétition

Le responsable de Roze Hockey, autre académie de hockey de haut niveau, nous confirme les mêmes choses. Il n’y a pas de secret, le talent n’est qu’une partie de l’équation. Le vrai élément qui change la donne, c’est le travail. Pendant un match, on touchera réellement la balle quelques minutes en tout sur les 70 de jeu. C’est loin d’être suffisant. Il faut multiplier les temps passés au contact de la balle et répéter les bons mouvements qui créeront des automatismes et auront un impact significatif sur le niveau de jeu.


C’est ce que le scientifique Anders Ericsson a démontré dans ses recherches. Au bout de 20 ans d’études sur des joueurs d’échecs et des musiciens, il a établi qu’il faut 10.000 heures de pratique pour maîtriser un sujet. L’idée que le plus brillant arrive en haut est fausse. C’est la pratique délibérée et constante qui est le facteur déterminant du succès. La répétition de mouvement va muscler notre cerveau, les connexions neuronales seront plus rapides et efficaces, la créativité et l’inspiration viendront plus facilement. Plus on joue, meilleur on devient. Pour donner un ordre de grandeur, pour atteindre ces fameuses 10000 heures, il faut pratiquer six années de travail à raison de huit heures par jour, pendant cinq jours par semaine et cela quarante semaines par an. Il y a donc pas mal de chemin vers la maîtrise. On comprend mieux pourquoi les vétérans portent aujourd’hui le nom de « Masters » après leurs 40 années et plus de hockey.


Une des choses qui choque est aussi l’impression que ce sont les parents qui poussent à ce que l’enfant prenne des cours. Pourtant, tant chez Ballostick que chez Roze, c’est rarement le parent qui est à l’origine de la demande, mais presque toujours l’enfant. On est face à des jeunes qui ont faim de hockey, veulent en savoir plus et en faire plus. Alors pourquoi le leur refuser ? Chez Roze, la base est d’établir des objectifs. Jamais de séances à la carte et pas non plus de tous petits. Le travail se fait avec des jeunes qui ont déjà un niveau de hockey et qui veulent encore l’améliorer. On se fixe alors des objectifs réalistes et atteignables, on met au point un programme et un parcours, et tout au long de ce parcours, on débriefe et on adapte.


Des jeunes qui veulent rugir

Bien sûr, ces cours particuliers ne doivent pas forcément devenir un passage obligatoire ni une habitude hebdomadaire, mais plutôt l’équivalent d’une piqûre de rappel de temps à autre. Dans une seule séance, un entraineur peut déjà transmettre de nombreux exercices à travailler, mais c’est au jeune de s’exercer et de pratiquer. La critique qui serait que chacun ne peut s’offrir ce genre de cours nous semble infondée. Un cours d’une heure avec un coach particulier revient à 55 euros et si on veut les conseils d’un Red Lions, cela monte à 70 euros. Notons qu’à deux ou trois, le prix par joueur diminue. Moins de 70 euros pour une séance de travail d’une heure avec un champion du monde, d’Europe et médaillé olympique ne parait pas être hors de prixet peut être un merveilleux cadeau d’anniversaire ou de Noël pour un enfant mordu de hockey.

Après cette séance, le travail est dans ses mains et dans ses jambes. L’histoire de chacun de nos fauves nationaux n’est-elle pas jalonnée de cris, de larmes et de gouttes de transpiration.


La question est donc la suivante : faut-il vraiment priver un enfant dont le rêve est d’atteindre le plus haut niveau, des conseils de ceux qui y sont arrivés ? Le coach ne remplacera, quoi qu’il arrive, jamais le travail individuel! Dix mille heures de travail pour atteindre la maîtrise.


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