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Qui s’occupe des oranges?

  • Photo du rédacteur: GRGT
    GRGT
  • 7 sept. 2024
  • 3 min de lecture

Cette tradition nous rappelle qu’on est bien au hockey, le samedi matin, avec les copains, qu’il y a encore une mi-temps et que le stick va maintenant nous coller aux mains.


Difficile de trouver aujourd’hui un hockeyeur qui se souviendrait du temps où il n’y avait pas d’oranges à la mi-temps. Habitude prise après la Seconde Guerre mondiale et vantée pour ses vertus énergétiques (vitamines, sucre) et hydratantes, l’orange s’est imposée comme pause chez les sportifs, et donc aussi les joueurs de hockey. Les fruits étaient promus à grand renfort de slogans publicitaires comme «an apple a day, keeps the doctor away» et les oranges en ont profité. La découverte de la vitamine C, sa concentration dans les agrumes et ses bienfaits pour la santé, au début des années 1930, a propulsé ce fruit au rang de super-aliment.    


Pour les hockeyeurs qui ont commencé ce sport dès le plus jeune âge, on ne peut d’ailleurs imaginer souvenir plus proustien que ce quartier d’orange qu’on nous proposait, pour ne pas dire imposait, à la mi-temps.


Et le plus surprenant, c’est que ce souvenir est rarement associé à un temps radieux, mais plus souvent à une météo maussade d’octobre, bruine et polo qui colle, coup de sifflet de milieu de match, encore l’autre moitié à «tirer»...


On se rassemble. Y a Didier qui nous vanne sur notre passe ratée, celui «qui voudrait bien être capitaine» qui lance son «hé, les gars!», parce que lui, vous comprenez, il écoute ce que le coach raconte. En cercle, on se frotte les uns aux autres. C’est un sport de contact. Et on shoote dans nos sticks avec nos chaussures trempées par un terrain arrosé contre son gré.


Le coach dit des trucs qu’on sait déjà. Fred fait une blague, comme d’hab’, on ricane tous. Y en a un qui s’est écarté, il a trouvé une balle. Discretos, on commence petit à petit à reculer d’un pas pour essayer de la lui prendre, pas de raison qu’il s’amuse pendant que nous on prend cher.


L'entraîneur a à peine le temps de lancer son «ho, on m’écoute, là?», que le tupperware blanc rempli de quartiers d'oranges s’incruste  au milieu du cercle. On ne se souvient même plus de quand date notre premier tupperware, quand on s’est dit «et quoi, on doit les manger?».


Fini les bavardages du coach, seize gamins s’agenouillent dans leurs jambières trop grandes pour qu’elles durent plus longtemps, et se jettent sur ces fabricants de grimaces.

  

Elles n’ont d’ailleurs pas le même goût si on ne les mange pas de la manière accoutumée: mordre le quartier à pleines dents, en se donnant ce merveilleux sourire orange, regardant les potes arborer le même rictus avant de braquer nos yeux sur le coach et les parents.


Rarement mûres et sucrées, souvent trop «sures», les yeux plissés trahissant ce que le sourire ne laisse pas transparaître, c’est bon qu’on a faim et soif en même temps. Et puis, il y a François, qui en prend une deuxième, toujours. Et Pat, qui la mange jusqu’au bout, au point de se demander s’il va manger la peau.


On jette ensuite les restes dans le petit bois à côté. Et on se fait engueuler, alors on doit aller les chercher et les remettre dans le tupperware…


Coup de sifflet. Le match doit reprendre. Sauvé par le gong. De toute façon, c’est bio-dégradable une pelure d’orange, non? 

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